Les membres de l’ILC recourent à différentes stratégies pour garantir la participation des femmes aux processus décisionnels relatifs à la gouvernance des terres et des ressources naturelles. Quelle que soit leur région d’intervention, ils ont pris les mesures suivantes pour atteindre cet objectif.
Cette « note pratique » fait suite à un échange de réflexions collectif organisé lors du deuxième atelier de l’Initiative communautaire d’apprentissage en matière de protection des terres (Community Land Protection Learning Initiative), en juillet 2019. Des membres du monde entier y ont participé : RMI, JKPP, RRF, Observatorio Ciudadano, ICCA, IIED et NAMATI. Cette note fait partie d’une série de cinq.
L’INITIATIVE COMMUNAUTAIRE D’APPRENTISSAGE EN MATIÈRE DE PROTECTION DES TERRES APPORTE AUX MEMBRES DE L’ILC LES COMPÉTENCES PRATIQUES NÉCESSAIRES À L’AUTONOMISATION DES COMMUNAUTÉS, POUR QU’ELLES PUISSENT DOCUMENTER ET PROTÉGER LEURS DROITS FONCIERS
Comment renforcer la participation des femmes aux réunions communautaires
BIEN CHOISIR L’HEURE ET LE LIEU DES RÉUNIONS
Pour les femmes, l’heure et le lieu des réunions communautaires sur la protection des terres jouent un rôle déterminant. Lorsque vous organisez une réunion, tenez compte des horaires et des lieux de travail quotidiens des femmes : il leur sera plus simple d’y assister si elle a lieu dans centre d’artisanat, par exemple, où elles ont l’habitude de se retrouver, ou à tout autre endroit qui leur soit commode et facile d’accès.
RENFORCER L’ATTRACTIVITÉ DES RÉUNIONS GRÂCE À DES PROGRAMMES VARIÉS
Diversifier l’ordre du jour des réunions contribue à les rendre plus attractives. L’inclusion de sujets pertinents eu égard au renforcement des moyens de subsistance des femmes, tels que les droits fonciers des femmes, et, dans certains cas, de cours d’alphabétisation pour adultes, incite les femmes à participer aux réunions sur la protection des terres communautaires. Certaines réunions doivent être réservées aux femmes afin de les encourager à s’exprimer librement, sans crainte du jugement des hommes de la communauté ; mais surtout, les femmes doivent être en première ligne dès lors qu’il s’agit d’organiser, de promouvoir et d’animer les réunions.
ADAPTER LES RÉUNIONS AUX BESOINS DES FAMILLES
Adapter les réunions communautaires aux besoins des familles permet de renforcer la participation des femmes. Ainsi, vous pouvez encourager les participant·e·s à se rendre aux réunions en famille ou proposer des services de garde d’enfants pour inciter les femmes à y assister. La mise à disposition d’un repas cuisiné favorise par ailleurs leur pleine participation, puisqu’elles n’ont alors plus à se soucier des besoins alimentaires de leur famille. Plus important encore, les questions relatives aux droits fonciers des femmes et à la protection des terres communautaires peuvent être abordées dans le cadre de services d’enseignement, tels que les cours d’alphabétisation pour adultes, où elles pourront être étudiées à la fois par les femmes et par les hommes, afin que l’ensemble de la communauté soit sensibilisé à l’importance des droits fonciers des femmes.

Comment stimuler la prise de parole des femmes dans le cadre des réunions communautaires
ANIMATEUR·RICE : UN RÔLE ESSENTIEL
Les animateur·rice·s ont un rôle crucial à jouer dans la promotion de la prise de parole des femmes : en lançant des discussions sur des sujets qui concernent les femmes, ils/elles les encouragent à partager leurs expériences. Leur rôle leur permet aussi de poser des questions directrices qui donnent suffisamment de place aux femmes pour intervenirdans le cadre de ces échanges. À l’aide de supports visuels, de symboles ou d’autres outils de communication, l’animateur·rice peut en outre inviter les femmes à discuter ouvertement de problématiques qui les touchent.
ÉCOUTER LES FEMMES
Les femmes seront davantage en mesure d’exprimer leur opinion sans honte ni crainte si elles se savent écoutées. Les animateur·rice·s doivent adopter un comportement exemplaire et donner aux femmes la possibilité de partager leur expérience sans être interrompues inutilement. Identifiez de ferventes défenseuses de la cause des femmes, capables de montrer aux autres femmes comment exprimer leur opinion, partager leurs idées et prendre de l’assurance.
RÉFLÉCHIR À L’AMÉNAGEMENT DU LOCAL
Aménagez le local de manière à favoriser un flux d’échanges constant, par exemple en installant les participant·e·s en cercle afin que chacun·e puisse être vu·e et entendu·e de tous. Si possible, menez la réunion dans la langue locale pour encourager les femmes à s’exprimer librement.
CONSIDÉRER LES HOMMES COMME DES ALLIÉS
Les hommes sont des alliés de la sécurisation des droits fonciers des femmes ; c’est pourquoi il importe de leur donner les moyens de promouvoir l’égalité entre les genres et les droits fonciers des femmes. À cette fin, il convient d’être à l’écoute des préoccupations des hommes et des jeunes. Vous pouvez diviser l’assistance en trois groupes — hommes, femmes et jeunes — et inviter chaque groupe à rendre compte de ses préoccupations et de son point de vue en plénière, de manière à renforcer la communication intracommunautaire.

Comment assurer l’adoption des idées des femmes par la communauté
RECONNAÎTRE ET PROMOUVOIR L’IMPORTANCE DES CONNAISSANCES DES FEMMES
La prise en compte et la promotion des droits fonciers des femmes sont essentielles au renforcement des droits fonciers communautaires en général. C’est pourquoi il importe de mettre l’accent sur la valeur des connaissances des femmespour la communauté tout entière. Leur expertise porte notamment sur la collecte du bois de chauffage, les plantes médicinales, l’eau, ainsi que d’autres ressources. Les femmes doivent donc toujours être impliquées dans les discussions relatives à la gestion des terres et des ressources naturelles.
PROMOUVOIR LES INTÉRÊTS DES FEMMES
La promotion des intérêts des femmes en dehors des réunions permet de veiller à la protection effective de leurs droits fonciers au quotidien. Les initiatives novatrices, consistant par exemple à organiser des présentations réalisées par un panel constitué de femmes ou à rédiger des ouvrages et des notes stratégiques sur les droits fonciers des femmes, doivent toujours donner la parole aux femmes et présenter leur point de vue. Des supports audiovisuels peuvent être utilisés pour exposer et documenter les obstacles auxquels les femmes doivent faire face pour sécuriser leurs droits fonciers. Si elles sont intégrées aux activités du projet, les idées formulées par les femmes peuvent servir à rechercher des financements pour les initiatives de protection des terres communautaires.
NOTER TOUTES LES IDÉES
Consigner toutes les idées formulées par les femmes permet d’assurer leur prise en compte dans la décision finale. Il convient de donner à la communauté la possibilité de récapituler les éléments abordés au cours de la réunion pour veiller à ce que la décision finale soit représentative des principales idées évoquées.
INCITER LES FEMMES À PRENDRE L’INITIATIVE
Les femmes doivent être à l’initiative du plaidoyer en faveur de leurs droits fonciers à l’échelle de la communauté et assumer le rôle de meneuses et de défenseuses de leur propre cause. Il faut donc qu’elles participent aux différentes initiatives visant à leur transmettre des compétences en leadership. Mais surtout, les femmes doivent avoir la possibilité de travailler en collaboration avec les chefs communautaires et de participer à des forums nationaux ou à des réunions communautaires où elles seront en mesure d’échanger avec les dirigeants au sujet des politiques foncières nationales ou régionales.

Comment garantir l’élection de femmes à des postes dirigeants
DÉCONSTRUIRE LES RÔLES SEXOSPÉCIFIQUES
L’accession des femmes à des postes de direction suppose la déconstruction des rôles sexospécifiques et la redéfinition des rôles en matière d’exercice du pouvoir. Remettre en question le caractère masculin et ferme du pouvoir et introduire de nouvelles normes quant à son exercice aide les femmes à assumer une position d’autorité.
INSTAURER DES POLITIQUES ET DES QUOTAS COMMUNAUTAIRES
Pour favoriser l’accession des femmes à des postes de direction, il peut être utile de s’appuyer sur les quotas politiques imposés à l’échelle nationale ou d’instaurer une politique communautaire d’élection des femmes aux postes dirigeants de la communauté. Parallèlement, les femmes doivent être encouragées à prendre des mesures en vue de leur autonomisation et à se présenter aux élections locales sans se contenter de postes secondaires ou administratifs (tels que secrétaire ou trésorière). Il convient par ailleurs d’inciter les communautés à élire des instances dirigeantes paritaires.
CRÉER DE NOUVEAUX ESPACES DE POUVOIR ET ENCOURAGER LE MENTORAT
La création de nouveaux espaces de pouvoir, tels que les coopératives, dont la direction est assurée par des femmes constitue un autre moyen de donner le pouvoir aux femmes. En outre, le mentorat et le renforcement des compétences jouent un rôle essentiel dans l’amélioration des possibilités d’accession des femmes à des postes dirigeants. Dans le cadre de leurs rôles de dirigeantes, les femmes sont invitées à s’épauler mutuellement et à transmettre leurs compétences. Les femmes occupant des postes de direction à l’échelle nationale peuvent par exemple conseiller des femmes dirigeantes au niveau communautaire et leur permettre d’accéder à de meilleures opportunités au sein de leur réseau.