La Coalition internationale pour l’accès à la terre est une alliance mondiale d’organisations intergouvernementales et de la société civile qui oeuvrent ensemble pour promouvoir l’accès sécurisé et équitable à la terre et les droits fonciers des hommes et femmes pauvres, par le biais du plaidoyer, du dialogue et du renforcement des capacités. Plus de 370 millions de personnes dans le monde appartiennent à une communauté autochtone. Selon les estimations, elles représentent environ 5 % de la population mondiale, 15 % de la population pauvre du monde et environ un tiers des 900 millions de personnes extrêmement pauvres vivant en zone rurale. Les peuples autochtones entretiennent une relation spirituelle, culturelle, sociale et économique très forte avec leurs terres traditionnelles, mais leurs droits fonciers sont souvent très précaires. C’est la raison pour laquelle les questions autochtones sont au coeur du travail de l’ILC.
L’objectif principal de l’ILC, contenu dans son Cadre stratégique 2011-2015, est de « permettre aux pauvres des zones rurales, hommes et femmes, d’obtenir un accès sécurisé et équitable à la terre ainsi que des droits fonciers, afin de renforcer leur sécurité alimentaire et de combattre la pauvreté et la vulnérabilité » 1. Le Cadre stratégique mentionne à de nombreuses reprises les peuples autochtones, mais la Coalition ne les a pas encore définis comme une catégorie spécifique de détenteurs collectifs de droits et n’a jamais axé son travail spécifiquement sur les questions autochtones.
Le 27 avril 2013, à l’issue du Forum foncier mondial et de la 27e Assemblée des membres, les membres de l’ILC ont adopté une déclaration commune, la Déclaration d’Antigua, dans laquelle ils expriment leur inquiétude vis-à-vis de l’extrême vulnérabilité de nombreuses communautés autochtones à l’accaparement des terres et à la criminalisation de l’utilisation coutumière de la terre et des ressources naturelles, face à l’essor des industries extractives, des zones de conservation et de l’agriculture commerciale. Convaincus que le respect des cultures autochtones contribue au développement et à la gestion durable et équitable de l’environnement, les membres de l’ILC se sont engagés « à travailler ensemble pour soutenir plus efficacement la lutte des communautés autochtones en faveur de leurs droits territoriaux et de la protection de leur environnement ».
Les participants se sont également engagés à agir en faveur de la gouvernance foncière centrée sur les personnes, dans une liste de dix engagements annexée à la Déclaration d’Antigua. Ces engagements s’inspirent des Directives volontaires pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire
nationale (VGGT) et du Cadre et des Lignes directrices sur les politiques foncières en Afrique (CLD).
Les membres de l’ILC se sont notamment engagés à « respecter et protéger les droits fonciers et territoriaux inhérents des peuples autochtones tels qu’énoncés dans la Convention n°169 de l’OIT et la déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones, notamment en reconnaissant que le respect des savoirs et des cultures autochtones contribue à un développement durable et équitable, ainsi qu’à une bonne gestion de l’environnement ».
Au cours de l’Assemblée des membres 2013, l’ILC a accueilli plusieurs nouveaux membres, dont certaines organisations prestigieuses qui ont pour mission spécifique de représenter les peuples autochtones ou qui sont spécialisées dans les questions autochtones, telles que Asian Indigenous Peoples’ Pact (AIPP), le Groupe international de travail sur les peuples autochtones (IWGIA) et Ogiek Peoples’ Development Program.
Par ailleurs, en février et mars 2013, l’ILC a mené une enquête visant à recenser l’engagement, les expériences et l’intérêt des membres vis-à-vis des droits fonciers des peuples autochtones dans le but d’identifier les domaines principaux intéressant la Coalition. Quarante-deux membres, soit environ 37 % des membres de l’ILC, ont répondu à cette enquête 2. Même si l’on peut partir du principe que les membres qui ont répondu sont également ceux qui s’intéressent de près aux questions autochtones, l’enquête a tout de même confirmé qu’un pourcentage considérable de participants travaillaient sur des questions portant sur les droits des peuples autochtones à la terre, aux territoires et aux ressources : au moment de l’enquête, 88 % des participants travaillaient sur des questions liées aux droits des peuples autochtones à la terre, aux territoires ou aux ressources, 90 % pensaient que l’ILC devait axer son travail plus spécifiquement sur cette question et 83 % souhaitaient participer à un groupe thématique de l’ILC sur les peuples autochtones.
Étude exploratoire
Entre février et mai 2013, l’ILC a élaboré un document d’orientation politique visant à définir comment son travail relatif aux droits des peuples autochtones à la terre, aux territoires et aux ressources pouvait être élargi et consolidé pour appuyer un engagement plus stratégique et systématique.
Le 13 février 2013, au cours du Forum des peuples autochtones du FIDA, l’ILC a organisé un déjeuner de travail et recueilli à cette occasion les contributions de 18 participants représentant diverses organisations autochtones et internationales. Elle a par la suite organisé un atelier technique sur les peuples autochtones les 3 et 4 mars, qui visait à identifier les difficultés auxquelles se heurtent les peuples autochtones en Afrique, en Asie et en Amérique latine et à définir les points d’intérêts et axes de travail stratégiques principaux pour la Coalition. Dix experts provenant de diverses régions et représentant plusieurs organisations internationales ont participé à cet atelier. Enfin, l’enquête susmentionnée a fourni des informations utiles concernant l’engagement, les expériences et les intérêts de l’ILC vis-à-vis des droits fonciers des peuples autochtones.
Toutes ces initiatives avaient pour but d’impliquer les acteurs pertinents travaillant sur les questions autochtones au sein et en dehors des réseaux de l’ILC et de contribuer à l’élaboration de l’étude exploratoire. Un document de synthèse a été diffusé pour observations et distribué lors du Forum foncier mondial et de l’Assemblée des membres au Guatemala, ainsi qu’au cours d’un événement parallèle de l’ILC à la 12e session de l’Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones à New York.
Argumentaire
Les peuples autochtones accordent une importance toute particulière à leur relation à la terre et au territoire, qui jouent un rôle fondamental pour leurs cultures, leurs valeurs spirituelles et leur survie en tant que peuples distincts. C’est pourquoi ils sont définis par le droit international, et plus particulièrement par l’UNDRIP, comme détenteurs de droits collectifs spécifiques relatifs aux terres, territoires et ressources. Il ne s’agit pas de droits spéciaux, mais de mesures spéciales visant à permettre aux peuples autochtones de jouir de l’ensemble des droits de l’homme au même titre que les autres segments de la société. Malheureusement, les droits des peuples autochtones, notamment leurs droits aux terres, aux territoires et aux ressources, sont très souvent violés en raison de la non reconnaissance des États ou de l’absence d’application effective des lois existantes. Ces violations ont de graves conséquences sur les peuples concernés ainsi que sur les sociétés dans lesquelles ils vivent, car elles sont à l’origine de conflits et d’insécurité.
L’analyse du travail de l’ILC en tant que réseau international révèle que les questions autochtones et les priorités thématiques telles que les terres communes, les parcours, la gouvernance foncière collective et les pressions commerciales sur la terre se recoupent largement. En outre, le travail mené par l’ILC auprès des pasteurs en Afrique, des campesinos dans la région des Andes et des communautés ethniques en Asie concerne ou touche des peuples autochtones.
Malgré cela, l’ILC ne les a jamais identifiés comme une catégorie spécifique de détenteurs de droits collectifs et ne s’est pas penchée spécifiquement sur les questions autochtones. Il n’est donc pas possible d’associer directement les connaissances et les expériences de l’ILC avec la promotion des droits des peuples autochtones.